Le jute est cultivé depuis très longtemps dans la région du Golfe du Bengale mais les premières exportations vers l’Europe de l’ouest datent seulement des années 1700. La fibre est alors utilisée dans la fabrications de cordages. La première manufacture de filage du jute fût créée en Écosse en 1822. Or, dès 1855 l’Inde développa sa propre capacité à transformer le jute.
Deuxième fibre naturelle la plus produite et consommée au monde derrière le coton, le jute pousse principalement en Inde et au Bangladesh, les deux plus gros pays producteurs. L’Inde serait numéro 1 en terme de quantité, le Bangladesh remporterait les honneurs du point de vue de la qualité.
On estime à plus de 30 millions le nombre de personnes qui dépendent, directement ou non, de l’industrie du jute. Malheureusement, celle-ci rapporte peu et souffre de la concurrence des matières synthétiques. Bonne nouvelle, depuis quelques années, on voit apparaître diverses initiatives visant à promouvoir le potentiel innovateur de cette fibre et ses nouvelles applications.
Souvent mélangé à d’autres fibres comme le chanvre, le coton ou le lin, le jute est principalement utilisé pour la fabrication de sacs, de géotextile biodégradable, de cordes et de tapis.
Même si le mot “chanvre” se traduit “cannabis” en latin, il faut savoir qu’il s’agit bien de plantes distinctes. Pour les différencier, on parle de chanvre textile, de chanvre industriel ou agricole. Cette plante a une très faible teneur en THC (substance hallucinogène), moins de 0.3% selon les pays, comparativement au cannabis (ou chanvre récréatif) qui peut en contenir 10-20 ou même 40%. Autre différence importante, la plante qui produit le chanvre textile peut mesurer jusqu’à 5 mètres de hauteur alors que la tige du chanvre récréatif ou thérapeutique demeure plutôt basse.
Ceci étant dit, parlons chanvre!
Le chanvre est une des premières plantes domestiquées par l’homme en Asie, environ 9000 ans avant J.-C.. En plus de ses vertus en pharmacologie, on l’utilise d’abord pour les nombreux usages domestiques de son huile: pour la peinture et le vernis, les lampes à l’huile, le savon et l’industrie du cuir.
Le chanvre est également très important dans la fabrication de cordages et de voiles pour la marine civile et militaire. En 1492, 80 tonnes de voiles et de cordages de chanvre ont aidé Christophe Colomb à atteindre le Nouveau Monde (Amérique).
Aussi, les chefs-d’œuvre de Grands Maîtres de la peinture comme Velãzquez, Rambrandt et Van Gogh ont été exécutés sur des toiles tissées en chanvre.
Finalement, je vous laisse deviner quelle fibre a servi pour la fabrication du premier drapeau des USA de même que pour les premiers « jeans » de Levi Strauss! En fait, en 1850, environ 80% de tout le textile mondial était produit en chanvre.
Les raisons ne manquent pas: les textiles de chanvre sont pratiquement impossible à user, ils résistent à la chaleur, à l’humidité, à la lumière (UV), aux insectes, en plus d’être antibactériens et d’une solidité exceptionnelle. La culture du chanvre est aussi 100% écologique, ne nécessitant aucun herbicide, pesticide ou engrais, en plus de ses besoins en eau, 10 fois moins grands que le coton.
En plus des huiles et des texiles, le papier et le développement de ses techniques de fabrication marquent aussi l’histoire du chanvre. Deux exemples intéressants: c’est sur du papier de chanvre que furent imprimés le premier livre en Europe, la Bible de Gutenberg en 1455, de même que la Déclaration d’Indépendance des États-Unis d’Amériques qui date de 1776.
Vers 1850 s’amorce le déclin du chanvre. Je dirais que trois facteurs ont grandement contribué à sa chute. Le bois, qui remplace peu à peu le chanvre dans la production du papier, résultat de la montée du pétrole et de l’influence de l’Amérique du Nord qui ne manquent pas de forêts. La mécanisation des récoltes de coton alors que celle du chanvre s’effectue toujours manuellement. Et la propagande contre la culture du chanvre (cannabis), aidé par le fort lobby du coton, qui culmine avec la prohibition de la culture du chanvre dans plusieurs pays producteurs du monde.
Aujourd’hui, on assiste à la « réhabilitation » de la culture du chanvre, particulièrement en Europe et au Canada. Même les Américains de quelques États ont retrouvé le droit de cultiver le chanvre agricole depuis 2014. En 2016, la Chine était le plus important producteur de chanvre avec 45 000 ha de terres cultivées, suivie de l’Europe avec 33 000 ha et du Canada avec 31 000 ha. En Europe, c’est en France que ça se passe! Plus de la moité de la production européenne provient de ses terres où il s’est cultivé près de 128 000 tonnes de chanvre en 2017.
Preuve que la production de chanvre a de nouveau le vent dans les voiles, la EIHA, l’Association du chanvre industriel européen, évalue la possibilité d’accroître les terres occupées par le chanvre de 300% d’ici 2025-30!
On redécouvre les nombreuses qualités du chanvre, ses vertus environnementales et ses diverses applications. Des usages connus depuis toujours mais aussi des nouveaux, récemment mis au point, notamment dans le domaine de la construction, de l’alimentation et des matériaux composites. On recenserait plus de 300 produits dérivés du chanvre actuellement dans le monde.
Enfin, il était plus que temps d’avouer ne plus pouvoir se passer d’une plante aussi extraordinaire, une plante qui peut à la fois soigner, nourrir, vêtir et loger l’être humain.